Saviez-vous que plus de la moitié des entreprises (57%) qui ont besoin de s’agrandir et de délocaliser leurs activités se trouvent en zone résidentielle ? Et que leur principale motivation de délocaliser leurs activités est le manque de place (71%) ? (Enquête menée par la Chambre des Métiers)
Quoi de plus logique de la part des élus locaux que de vouloir créer un zoning communal pour répondre à ces besoins. Parfait :
« Créons un zoning communal ! »
Il faut être conscient que la création d’un zoning communal engendre des frais d’infrastructure conséquents (eaux, électricité, gaz, routes etc) dont la commune doit supporter 85 % (15% sont pris en charge par l’Etat). Et connaissant la situation financière difficile de nombreuses communes, cette charge financière peut être à elle seule un frein au développement des zonings communaux.
« Alors, créons un zoning régional (intercommunal) ! »
Il s’agit de zonings qui sont gérés par plusieurs communes (généralement un syndicat de communes) et dont 85% des frais d’infrastructures sont préfinancés par l’Etat. Un sacré avantage pour les communes, donc (ex : « Salzbaach » à Wiltz, « Op der Héi » à Hosingen, « In den Allern » à Troisvierges, Eselborn-Lentzweiler).
Et pour les entreprises ? L’existence de ces zonings régionaux est assurément un énorme avantage pour bon nombre d’entreprises, car ils y trouvent un endroit pour s’implanter, le tout à un prix abordable. Mais avant qu’une entreprise puisse s’y établir, il faut l’accord Ministère de l’Economie et du Commerce extérieur. Ceci est d’ailleurs tout à fait légitime, si on considère leur préfinancement substantiel. Or, un nombre important d’entreprises, en particulier les entreprises de services, du commerce de gros et de détail, ne sont pas éligibles pour ces zones. Le problème pour ces entreprises reste donc entier !
« Alors ce sera un zoning communal malgré tout ! »
C’est la commune qui décide à elle seule qui peut s’implanter dans un zoning communal. Alors, bien qu’un zoning communal coûte a priori d’avantage aux communes qu’un zoning régional, certaines communes ont malgré tout voulu créer un zoning communal, afin que toutes les entreprises qui le souhaitent puissent trouver des lieux d’implantation.
Mais c’est alors que de nouveaux éléments entrent en jeu. La création d’un zoning nécessite divers accords ministériels. Et vu le nombre élevé de demandes pour la création de zones communales, la Direction de l’Aménagement du Territoire a estimé à juste titre qu’il serait plus raisonnable pour les communes d’agir de manière concertée pour ne présenter qu’UN SEUL dossier commun. On constate cependant les limites de pareille approche. Car qui dit dossier commun, dit zoning régional. Et les entreprises à caractère commercial ne sont en principe pas éligibles pour s’y implanter. Problème non résolu !
Je ne jette pas la pierre à la Direction de l’Aménagement du Territoire, car leur manière de procéder naît du bon sens : Il est toujours préférable de présenter un dossier concerté plutôt que d’autoriser la création de zonings de manière « anarchique » tous les 5 kilomètres. Malgré tout, j’ai la sensation de me trouver en plein milieu du livre « Brave new world » de George Orwell. Où toutes les entreprises sont égales, mais certaines entreprises (celles qui sont éligibles pour intégrer un zoning régional) sont plus égales que les autres. Une égalité des chances pour toutes nos entreprises ! Voilà un ressort insoupçonné qui pourrait donner du fil à retordre pour le Ministère de l’Egalité des Chances.
Sans parler du fait que le fameux plan directeur sectoriel « zones d’activités économiques », dont on parle depuis une dizaine d’années, n’en est qu’au stade d’avant-projet et dont le but est la coordination entre d’une part la planification et le développement de zones industrielles et commerciales et d’autre part la politique de l’aménagement du territoire.
Mais ne soyons pas trop pessimistes. Il y a quelques années, le Ministère de l’Economie et du Commerce extérieur, conscient du problème, a fait savoir qu’il entend créer des zonings intercommunaux pouvant également accueillir des entreprises à caractère commercial. Les textes de loi pour ce faire sont adoptés et, sans vouloir faire de jeu de mots, il ne reste plus qu’à les mettre en application « sur le terrain ». Alors, il reste de l’espoir. Et c’est bien connu : L’espoir meurt en dernier.
Heiderscheid, en novembre 2011.